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Re-connexion, ambiance bien vivre

Les chiens en laisse


J'aurais pu intituler ce billet "chiens gardés avec collier". Mais comme je ne suis pas aussi imaginative, je garde ce simple titre "chiens en laisse".
L'idée me trottait dans la tête depuis quelques semaines. Pourquoi les gens prennent des chiens qu'ils trimballent dans la rue au bout d'une laisse ? Cela n'a l'air de rien, mais le geste est symbolique. Nous sommes si habitués à voir des toutous boudinés flairer le sol en trottinant au bout d'une laisse que nous trouvons ça normal. Hommes ou femmes, ils déploient souvent une autorité troublante. Et que je te tire sur la laisse, et que je te la raccourcis. Et même parfois, nous avons droit à une vraie démonstration d'autorité. Le chien aux ordres doit perdre toutes ses manières de chien et s'en tenir à la rigueur d'une éducation canine qui ressemble à celle qu'on pourrait enseigner à un enfant, si seulement on éduquait les enfants !

Assise à la terrasse d'un café de bord de mer, j'observe les passants. Très vite, je m'aperçois que le nombre de personnes accompagnées d'un chien est important. je me mets à les compter. Mais il y en a trop. Ils se croisent, se suivent, les chiens se reniflent le derrière, se font rappeler à l'ordre "on ne renifle pas le cul au Pays des hommes !". La plupart des bêtes souffre d'obésité. La plupart des maîtres ressemblent à leur chien. Ou bien est-ce le contraire. Bien vu, Monsieur Disney ! Les chiens à frange ont des maîtres à franges, les chiens lisses ont des maîtres chauves ou rasés.

Il y a un je ne sais quoi de gênant dans cette prolifération de chiens. Bien sûr, il y a leurs déjections, multiples qui nous enfument le parcours de santé. Les plus visibles sont les grosses merdes déposées sur le passage comme le cadeau d'un soupirant trop timide qui lance à la volée son bouquet de fleurs qui échoue dans les pieds de sa belle, et se barre en courant. Il y a les merdes dissimulées sous les brins d'herbe d'une pelouse pas encore tondue, celles casées entre deux voitures, celles qui se rassemblent autour d'un arbre histoire de s'accorder un peu d'intimité. Pis, il y a les déjections invisibles, celles que les chiens posent à tout bout de champ sur les murs, les réverbères, les roues de voitures, pour marquer leur territoire, dernier vestige d'une vie sauvage oubliée. Les pauvres bêtes ont malheureusement un ennemi terrible à combattre dans leur quête de reconnaissance, c'est l'homme ! L'homme qui n'hésite pas à brouiller les pistes, l'homme souffrant sans doute d'énurésie chronique et se sent obligé de baisser la braguette à chaque coin de rue. A moins qu'il ne soit atteint d'amnésie qui le contraint lui aussi à marquer son parcours, comme le petit poucet semait des cailloux.
Mais il y a surtout ce désir impérieux qu'ont les gens de dominer. On appelle cela avoir un animal de compagnie. Drôle de compagnie en fait. Cela consiste à avoir quelqu'un aux ordres, à disposition. En ce qui concerne le chien, par de multiples alchimies, on a réussi à créer le toutou, sorte d'être humain à profil d'animal et 100 % soumis, une peluche qui fonctionne sans pile, dévouée jusqu'à la mort. A force d'imposer une vie humaine au chien, celui-ci a perdu la boule. Alors, on a créé les psy pour chien !
Comme c'est curieux, et comme c'est bête. Il y a dans certains pays un peu moins agonisants que le nôtre, des chiens qui sont considérés comme des chiens. Ils ne sont pas cultivés de manière intensive, ils ne sont pas vendus dans des magasins. Ils vivent leur vie de chien, sans collier et sans laisse, sans maître. Ils se taillent une place dans le paysage, personne n'est là pour les obliger à chier quand ça ne leur dit pas. Et curieusement, dans ces pays, il n'y a pas de merde de chien partout. Chez nous, on les appelle les chiens errants, ils sont sauvagement pourchassés, enfermés, euthanasiés. On les accuse de transmettre des maladies, le syndrome Pasteur a encore de beaux jours devant lui. Ils n'ont pas le profil de l'animal domestique, ils n'entrent pas dans le moule, ils sont donc condamnés.

Ah je sais que mémère et pépère ne vont pas apprécier ce billet. Mémère et pépère sont gentils pour leur chien, ils sont de bons maîtres et ne supportent pas qu'on les indisposent avec des propos tendant à les culpabiliser. Deux fois par jour, ils descendent toutou dans la rue et marchent avec lui pour qu'il se dégourdisse les pattes ! Tu seras un homme mon fils, si tu mets tes pas dans les miens !


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L
<br /> oui, biensûr... ou alors, on vit dans une grande ville comme Marseille, avec des gens qui courent partout sans regarder où ils mettent les pieds, d'autres qui conduisent comme des<br /> malades, et un petit chien adorable qui ne voient pas toujours le danger. Enfin, question de point de vue, hein... :)<br /> bravo pour vos autres articles :)<br /> <br /> <br />
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F
A la maison c'est un chat que nous avons, et comme les chats il fait ce qu'il veut quand il veut.Il y a une tristesse insondable dans le regard du chien sur la photo.
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S
Oui, très bon billet, Cib ! Je m'intérroge souvent à ce sujet ! La relation humain/animal mérite d'être explorée car révélatrice de bien des travers de notre société !
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F
Excellent billet, bien vu.@+
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P
<br /> Bonne journée Farid....<br /> <br /> <br />
Z
et nous les hommes , qui aimons ce genre de vie .dois-je comprendre, que jesuis logé à la même enseigne ? une reflexion très profonde et parlante. merci cib bonne soirée
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P
<br /> Merci Denis... je suis contente de tous ces commentaires, de cette réflexion du dimanche... Merci à toi et à vous tous....<br /> <br /> <br />
S
Plus grand chose à rajouter… mes 2 chats n'en font qu'à leurs têtes, et, à la campagne, pas besoin de laisse pour notre bébé chien.Ces animaux peuvent être des compagnons de vie enrichissants, pour peu qu'on leur laisse leur place, et que l'on respecte leur nature.Pour le reste, l'homme est le pire des animaux, le seul à tuer sans nécessité vitale.
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P
<br /> Absolument sylvie... des compagnons et non pas des sujets. Nous ne sommes les maîtres de rien du tout...<br /> <br /> <br />
N
Sortir de cette trilogie victime, bourreau, sauveur, pour la joie de ne rien être dans la plènitude de l'instant!Naradamuni/sans/ni+, ni-;)
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P
<br /> Vi,vi..... sortir de la raison alors....<br /> <br /> <br />
N
Le pire je crains c'est lorsque l'humain se comporte comme un mouton, il nourrit de ce fait les loups aprés s'être fait tondre par ses "Bergers"!
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P
<br /> <br /> <br /> <br />
N
En 1917, Sigmund Freud mit ce sujet en lumière en écrivant : “ Au cours de son cheminement culturel, l'homme a acquis une position dominante sur ses semblables au sein du règne animal. Non content de cette suprématie, il a voulu créer un gouffre entre sa nature et celle des autres animaux. Il leur a nié toute possession de raison et s'est attribué une âme immortelle ; enfin il s'est réclamé de filiation divine, ce qui lui a permis de supprimer tout lien entre lui-même et le règne animal. ” La domination, le contrôle et la manipulation qui caractérisent la manière dont les humains traitent les animaux qu'ils ont à leur merci donnèrent le la pour les rapports intra-humains. L'esclavage-domestication des animaux traça la route menant à l'esclavage humain. Pour reprendre les propos de Karl Jacoby, l'esclavage est “ l'extension de la domestication aux humains ”. Pour les premières civilisations qui naquirent au cœur des vallées de l'ancienne Égypte, de la Mésopotamie, de l'Inde et de la Chine, l'exploitation des animaux pour leur chair, leur lait, leur peau et leur force de travail était très fortement ancrée dans les mœurs ; aussi, ces civilisations considéraient que les animaux avaient été mis à leur disposition par les voies divines. Les humains pouvaient ainsi les utiliser, les maltraiter et les tuer en toute impunité. Cet état de fait contribua également à pouvoir rejeter certains humains - prisonniers, ennemis, étrangers, personnes différentes ou antipathiques - de l'autre côté de la frontière pour les traiter de “ bêtes ”, “ porcs ”, “ chiens ”, “ singes ”, “ rats ” ou “ vermine ”. Désigner des populations par des noms d'animaux n'a jamais été de bon augure car elles se retrouvent alors susceptibles d'être humiliées, exploitées et massacrées. Comme l'écrit Leo Kuper dans Genocide : Its Political Use un the Twentieth Century , “ le monde animal a toujours été une source abondante de métaphores de la déshumanisation ”. Des abattoirs aux camps de la mort Le lien entre exploitation animale et Holocauste est moins flagrant qu'entre exploitation animale et esclavage mais il existe néanmoins. Prenons l'exemple d'Henry Ford, dont l'influence sur l'histoire du XXe siècle commença, métaphoriquement, dans un abattoir américain pour arriver à Auschwitz. Dans son autobiographie, Ma Vie et mon oeuvre (1922), Ford raconte que c'est en visitant un abattoir de Chicago qu'il trouva l'inspiration pour mettre en place les chaînes de montage. “ Je pense qu'il s'agissait là de la première chaîne en mouvement jamais installée. L'idée des chaînes de montage m'est venue du chariot qui circule au-dessus des ouvriers d'abattoir de Chicago lorsqu'ils démembrent un bœuf. ” Une publication de la Swift and Company de cette époque décrivait le principe de répartition des tâches qui impressionna tant Ford : “ Les animaux abattus, suspendus tête en bas à une chaîne en mouvement, ou convoyeur, passent d'ouvrier en ouvrier, chacun effectuant une étape particulière du traitement des carcasses. ” Il n'y avait qu'un pas à franchir pour passer de l'abattage industriel des animaux au massacre d'humains par répartition des tâches. Dans The Lives of Animals , roman de J.M. Coetzee, le personnage principal, Elizabeth Costello dit au public venu l'entendre : “ Chicago nous a montré le chemin : ce sont ses parcs à bestiaux qui ont appris aux Nazis comment traiter les corps. ” Nombreux sont ceux qui ne savent pas à quel point les abattoirs ont joué un rôle important dans l'industrie américaine. “ Les historiens ont injustement dépouillé les ouvriers d'abattoir du titre de pionniers de la production en série, écrit James Barrett au sujet des ouvriers de Chicago du début du XXe siècle. Car ce n'est pas Henry Ford mais Gustavus Swift et Philip Armour qui ont développé le principe des chaînes de montage qui symbolisent, aujourd'hui encore, l'organisation rationnelle du travail. ” Henry Ford, celui-là même qui était impressionné par l'efficacité des ouvriers de Chicago lorsqu'ils tuaient et démembraient les animaux, contribua également au massacre d'humains en Europe. Non seulement il développa la méthode des chaînes de montage que les Allemands utilisèrent pour tuer les Juifs mais il lança aussi une campagne antisémite, une pièce de plus dans les rouages qui conduisirent à l'Holocauste. En effet, au début des années 1920, Ford fit publier dans le Dearborn Independent, l’hebdomadaire qu’il venait d’acheter, une série d'articles basés sur les Protocoles des Sages de Sion, un tract antisémite qui circulait en Europe. Il publia également une compilation d'articles aussi épaisse qu'un livre et l'intitula The International Jew ; elle fut traduite dans la plupart des langues européennes et largement diffusée par les antisémites, principalement par Theodor Fritsch, un éditeur allemand qui a très rapidement soutenu Hitler. Grâce au prestige de la maison Ford et à une campagne publicitaire bien étudiée, The International Jew connut un franc succès aux États-Unis et ailleurs..... La domination, l'exploitation et le meurtre d'animaux constituent un précédent au massacre d'humains et augmentent ses probabilités d'avoir lieu, car l'exploitation et le meurtre d'animaux nous conditionnent, nous entraînent à refouler notre empathie, notre compassion et notre respect envers ceux qui sont différents. Isaac Bashevis Singer a écrit : “ Il n'y a qu'un tout petit pas entre le fait de tuer les animaux et celui de créer des chambres à gaz à la Hitler. ” En effet. A la même époque, le philosophe juif allemand Theodor Adorno a eu une parole similaire : “ Auschwitz commence dès que l'on regarde un abattoir et que l'on se dit : ce ne sont que des animaux. ” En effet. "Généalogie de la morale"
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P
<br /> CQFD Merci ! Je n'ai rien à ajouter si ce n'est que j'espère que les lecteurs liront ce commentaire du début à la fin. L'humain qu'on considère comme un "chien" est celui sur qui on peut faire<br /> porter toutes les humiliations. Il y a pour moi un lien direct avec le fait qu'on se trimbale avec un chien au bout d'une laisse.<br /> <br /> <br />